Association d'Aide à la Scolarisation des Enfants Tsiganes
dans le Val d'Oise

mercredi 5 novembre 2014

CHARTE POUR LE RESPECT DES DROITS ET LA DIGNITÉ DES OCCUPANTS DE TERRAINS

« (…) L’ignorance, l’oubli ou le mépris des droits de l’Homme
sont la seule cause des malheurs publics (…) »
Préambule de la Déclaration des droits de l’Homme et du citoyen du 26 août 1789


PRÉAMBULE
Les organisations à l’initiative de cette Charte constatent, qu’en France, l’exclusion des plus démunis et leur précarisation entrainent
une résurgence des occupations illégales de terrains par nécessité, générant de nombreux habitats précaires et parfois l’implantation de bidonvilles.
Le nombre croissant d’expulsions et d’évacuations qui visent les occupants de ces terrains conduit à une aggravation manifeste
de leurs conditions de vie. Elles sont trop souvent menées au mépris des normes et principes fondamentaux, nationaux et internationaux, encadrant leur
mise en oeuvre.
La France a déjà été condamnée par les instances européennes et internationales à ce sujet.
Il est essentiel qu’un juste équilibre soit assuré entre le droit de propriété à valeur constitutionnelle et les droits fondamentaux des occupants,
notamment leur droit au logement. L’objectif poursuivi n’est pas de faire perdurer l’existence des bidonvilles ou d’autres types d’habitats précaires
mais d’améliorer les conditions de vie de leurs occupants dans l’attente de solutions de relogement dignes et pérennes.
Cette Charte s’appuie sur le droit français, européen et international pour rappeler les droits des personnes mais également les obligations
de l’ensemble des acteurs publics ou privés intervenant dans le cadre d’occupation sans titre de terrains.
Les droits et obligations, consignés dans cette Charte, concernent toutes les étapes de la vie sur un terrain, de son installation à son expulsion
ou évacuation, selon qu’elle repose sur une décision de justice ou sur un arrêté administratif, sans oublier la mise en place impérative d’alternatives
de relogement adaptées.
Les organisations à l’initiative de cette Charte s’engagent à la promouvoir et à la diffuser aux personnes concernées en exigeant le respect
des principes énoncés.
ARTICLE 1
Afin de rendre effectif le droit au logement, les
pouvoirs publics doivent tout mettre en oeuvre pour
éradiquer les bidonvilles en relogeant les occupants
contraints d’y vivre.
Références : article 8 de la Convention européenne des droits de
l’homme ; articles 3-1 et 27 de la Convention internationale des
droits de l’enfant ; article 11.1 du Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels ; article 34.3 de la Charte des droits
fondamentaux de l’Union européenne ; articles 30 et 31 de la Charte
sociale européenne révisée ; article L300-1 du Code de la construction
et de l’habitation ; article 1 de la loi du 6 juillet 1989 ; articles 1 et 1-1
al.1 et 2 de la loi du 31 mai 1990.
ARTICLE 2
Nul ne peut être discriminé du fait de son mode
d’habitation, de sa condition socio-économique ou
tout autre critère protégé par le droit international.
Références : article 225-1 du Code pénal, article 14 de la Convention
européenne des droits de l’homme, article 2 de la Convention
internationale des droits de l’enfant, article 2 du Pacte international
relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, articles 2 et 26 du
Pacte international relatif aux droits civils et politiques, article 21 de la
Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, article E de la
Charte sociale européenne révisée.
ARTICLE 3
Tout abri de fortune constitue le domicile des
occupants. Chacun a droit à la reconnaissance et au
respect de son domicile, et à son inviolabilité.
Références : articles 226-4 et 432-8 Code pénal, article 8 de la
Convention européenne des droits de l’homme, article 16 de la
Convention internationale des droits de l’enfant, article 17 du Pacte
international relatif aux droits civils et politiques, article 7 de la Charte
des droits fondamentaux de l’Union européenne.
ARTICLE 4
Nul ne peut faire l’objet de menaces ou de contrainte
de la part du propriétaire, des forces de l’ordre ou
de toute autre personne afin de lui faire quitter
illégalement son habitation de fortune, le terrain qu’il
occupe, ou la commune. Dans le cas contraire, l’auteur
de ces faits est passible de sanctions judiciaires.
Références : articles 222-14-2, 222-17 à 222-18-2 et 226-4 du
Code pénal, Observations générales n°4 et n°7 du Comité des droits
économiques, sociaux et culturels.
ARTICLE 5
Dans l’exercice de leurs fonctions, les forces de l’ordre
sont tenues de respecter les occupants quelles que
soient leur nationalité, leur origine ou leur condition
sociale.
Références : articles R434-11 et R515-7 du Code de la sécurité intérieure.
ARTICLE 6
Nul ne peut se voir refuser l’accès à l’eau, à l’électricité
et au ramassage des déchets ménagers. Il appartient
aux pouvoirs publics de tout mettre en oeuvre pour
faire respecter ces droits.
Références : article L210-1 du Code de l’environnement, article
L121-1 du Code de l’énergie, article L2224-13 du Code général des
collectivités territoriales, articles 2, 3 et 8 de la Convention européenne
des droits de l’homme, articles 3-1, 24-2 c) et 37 de la Convention
internationale des droits de l’enfant, article 14-2.h de la Convention
sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard
des femmes, article 28-2.a) de la Convention relative aux droits des
personnes handicapées, observations générales n°14 et n°15 du Comité
des droits économiques, sociaux et culturels, articles 1, 4 et 7 de la
Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.
ARTICLE 7
Tout arrêté municipal ou préfectoral d’évacuation
doit être justifié par des considérations de sécurité
mettant en situation de péril immédiat l’intégrité
physique des occupants et/ou des voisins, et se
fonder sur une appréciation stricte et proportionnée
du trouble à l’ordre public, dans le respect de la
dignité des occupants.
Références : articles L2212-2 et L2215-1 du Code général des
collectivités territoriales, articles 3 et 8 de la Convention européenne
des droits de l’homme, articles 4 et 7 de la Charte des droits
fondamentaux de l’Union européenne.
ARTICLE 8
Tout occupant doit être mis en mesure de contester
un arrêté municipal ou préfectoral manifestement
illégal.
Références : articles L2131-1, L2131-9 et R2122-7 du Code général
des collectivités territoriales, article R441-1 du Code de la justice
administrative, article 25 de la loi du 10 juillet 1991, article 43-1
du décret du 19 décembre 1991, articles 3, 6 et 8 de la Convention
européenne des droits de l’homme, article 3-1 de la Convention
internationale des droits de l’enfant, observation générale n°7 du Comité
des droits économiques, sociaux et culturels.
ARTICLE 9
Aucune expulsion ne peut être réalisée sans décision
de justice et sans que les garanties rappelées dans
cette Charte ne soient respectées.
Référence : article L411-1 du Code des procédures civiles d’exécution.
ARTICLE 10
Tout occupant menacé d’expulsion a droit à un procès
équitable, notamment au respect des règles de
procédure, aussi bien devant les juridictions civiles
qu’administratives.
Références : articles 12, 55, 503 al. 1er, 653 à 664-1 et 751 du Code
de procédure civile, articles R411-1 et R412-2 du Code des procédures
civiles d’exécution, article 25 de la loi du 10 juillet 1991, article 43-1
du décret du 19 décembre 1991, article 6 de la Convention européenne
des droits de l’homme, article 14 du Pacte international relatif aux droits
civiles et politiques, article 47 de la Charte des droits fondamentaux
de l’Union européenne.
ARTICLE 11
Tout occupant d’un terrain devrait bénéficier de la
même protection que les occupants d’un immeuble
bâti, en ce qui concerne les délais de maintien dans
les lieux.
Références : articles L 412-2, L 412-3, L 412-4, R412-2 (alinéa 1 in
fine) et R412-4 du Code des procédures d’exécution.
ARTICLE 12
Nul ne peut être expulsé durant la trêve hivernale, à
moins qu’une solution digne, stable et adaptée à ses
besoins n’ait été proposée.
Références : article L412-6 du Code des procédures civiles d’exécution,
articles 3 et 8 de la Convention européenne des droits de l’homme,
article 3-1 de la Convention internationale des droits de l’enfant.
ARTICLE 13
Aucune expulsion ou évacuation ne doit avoir lieu sans
un réel examen de la situation de chaque personne au
regard de sa situation familiale, de son état de santé,
de la scolarisation, de l’emploi et du logement.
Référence : circulaire interministérielle du 26 août 2012 relative à
l’anticipation et à l’accompagnement des opérations d’évacuation de
campements illicites.
ARTICLE 14
Aucune expulsion ou évacuation ne peut avoir lieu sans
proposition préalable d’une solution d’hébergement
ou de relogement digne, stable et adaptée aux besoins
des personnes.
Cette proposition ne doit ni enfreindre le principe
d’unité de famille, ni entraîner une inégalité de
traitement entre les personnes.
Références : articles L345-2-2 et L345-2-3 du Code de l’action sociale
et des familles, circulaire du 26 août 2012, articles 8 et 14 de la
Convention européenne des droits de l’homme, articles 3-1 et 9 de la
Convention internationale des droits de l’enfant, observation générale
n°7 du Comité des droits économiques, sociaux et culturels, article 34.3
de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, articles
30 et 31 de la Charte sociale européenne.
ARTICLE 15
Nul ne peut faire l’objet d’une expulsion forcée, même
autorisée par une décision de justice, dès lors que le
concours de la force publique n’a pas été accordé.
Référence : article 226-4-2 du Code pénal.
ARTICLE 16
Tout occupant doit être mis en mesure de contester
une décision d’octroi du concours de la force publique
manifestement illégale.
Références : article R 441-1 du Code de la justice administrative, articles
1 et 3 loi du 11 juillet 1979, article 25 de la loi du 10 juillet 1991,
article 43-1 du décret du 19 décembre 1991, articles 3, 6 et 8 de
la Convention européenne des droits de l’homme, article 3-1 de la
Convention internationale des droits de l’enfant, Observation générale
n°7 du Comité des droits économiques, sociaux et culturels.
ARTICLE 17
Aucune expulsion ou évacuation ne doit compromettre
la continuité de la scolarisation des enfants, ni
entraîner une rupture dans l’accompagnement
sanitaire et social des personnes.
Références : articles L131-1 et L131-6 du Code de l’Education, article
1110-1 du Code de la Santé publique, circulaire du 26 août 2012,
article 2 du protocole additionnel n°1 de la Convention européenne
des droits de l’homme, article 24 de la Convention internationale des
droits de l’enfant, article 13-1 du Pacte international relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels.
ARTICLE 18
Nul ne doit subir la destruction ou la rétention de ses
biens et de ses effets personnels.
Références : articles 322-1 al. 1er et 322-2 al. 3 du Code pénal, articles
544 et 545 du Code civil, articles L122-2, L433-1 à L433-3 et R433-
1 à R433-6 du Code des procédures civiles d’exécution, articles 2 et
17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août
1789, article 1er al.1er du protocole additionnel n°1 de la Convention
européenne des droits de l’homme, article 17 de la Charte des droits
fondamentaux de l’Union européenne.
ARTICLE 19
Nul ne doit subir d’entrave à sa liberté d’aller et venir
par les forces de l’ordre suite à une expulsion ou une
évacuation de terrain. Les occupants doivent rester
libres de se déplacer.


Références : article 12 al. 1er du Pacte international relatif aux droits civils
et politiques, article 2.1 du protocole n°4 de la Convention européenne
des droits de l’homme.

Liste des organisations qui soutiennent la Charte : Advocacy France, AFVS (Association des Familles Victimes de Saturnisme), AITEC (Association Internationale des Techniciens Experts et Chercheurs), Amnesty International France, ASAV (Association pour
l’Accueil des Voyageurs), Association des Cités du Secours Catholique, ATD Quart-Monde, CNDH Romeurope, Collectif les Morts de la Rue, Dalila Abbar (Jurislogement), Emmaüs France, Emmaüs Solidarité, European Roma Rights Centre, FAPIL (Fédération des Associations et
des Acteurs pour la Promotion et l’Insertion par le Logement), Fédération de l’entraide protestante, FEANTSA (Fédération Européenne des Associations Nationales Travaillant avec les Sans-Abri), FNARS (Fédération Nationale des Associations d’Accueil et de Réinsertion
Sociale), FNASAT (Fédération Nationale des Associations Solidaires d’Action avec les Tsiganes et les Gens du voyage), Fondation Abbé Pierre, Fondation de l’Armée du Salut, Halem, Hors la Rue, Housing Rights Watch, Jeudi Noir, La Cimade, Ligue des Droits de l’Homme,
MRAP (Mouvement contre le Racisme et pour l’Amitié entre les Peuples), Médecins du Monde, Parcours d’Exil, Petits Frères des Pauvres, Secours Catholique Caritas France, Syndicat des Avocats de France, Syndicat de la Magistrature

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